Les boules de poils chez le chat : inquiétant ou normal et comment aider?

Si vous avez un chat, vous êtes très probablement familier avec les boules de poils ou encore trichobézoards, pour utiliser l'appellation scientifique. Bien que les boules de poils soient un phénomène connu des gardiens de chats, il y a peu de publications scientifiques à ce sujet, c’est pourquoi on se demande souvent si cela est normal ou pas.
Dans cet article, on verra ce que sont les boules de poils et leurs causes mais aussi dans quelle mesure vous devez vous inquiétez si votre chat vomit régulièrement des boules de poils. Enfin, on examinera les remèdes possibles en cas de boules de poils.

Qu’est ce qu’une boule de poils ?

Comme vous le savez-bien, les chats se lavent en léchant leur fourrure avec leur langue. Comme celle-ci est couverte de papilles kératinisées dures appelées barbes, ils ingèrent des poils pendant leur toilette. Comme les poils ne sont pas digestibles, ils doivent passer à travers l’appareil digestif pour ensuite être excrété dans les selles. Cependant, les poils ingérés peuvent finir par former une boule de poil dans l’estomac et si elle devient trop grosse pour passer à travers le pylore (la sortie de l’estomac), le chat n’a pas d’autres choix que de vomir la boule de poil. [2]
Les signes qui peuvent indiquer que votre chat essaye de se débarrasser d’une boule de poil comprennent la toux, les vomissements et des hauts-le-cœur. [3]
En plus d’être une nuisance et inconfortable pour les chats, les boules de poils peuvent parfois bloquer l’appareil digestif du chat, causant une obstruction dans différentes parties de l’appareil digestif comme les intestins, l'œsophage ou encore le nez. Ces obstructions entraînent de nombreux symptômes comme des douleurs abdominales ou un refus de manger. Dans ce cas, le traitement sera souvent une chirurgie ou une endoscopie pour retirer la boule de poil (dans un rapport de cas, une boule de poils a été dissoute en utilisant du Coca-Cola administré directement dans l'estomac). Néanmoins, on ne sait pas si ces complications sont fréquentes ou si ce sont des occurrences rares. [2][4][5][15][17]

Quels sont les facteurs de risque ?

Il existe deux principaux facteurs de risque pour les boules de poils : une ingestion excessive de poils et une motilité gastro-intestinale altérée. [2]

Ingestion excessive de poils

Les chats à poils longs ont plus de chance d’avoir des boules de poils que ceux à poils courts, comme leur fourrure est plus longue ils ingèrent plus de poils lorsqu’ils font leur toilette. Le risque augmente aussi pour les races de chats à poils longs avec une fourrure dense. [1][6][18]
D’autres facteurs de risques comprennent tout ce qui pourrait augmenter la fréquence à laquelle les chats se toilettent comme le stress, une infestation de puce ou des démangeaisons. [2]

Motilité gastro-intestinale altérée

Une autre cause supposée est un manque de contraction de l'estomac pour vider son contenu. En fait, ce sont les contractions de l’estomac qui font passer son contenu vers les intestins, si les contractions ne sont pas assez efficaces les poils ne passeront pas à travers le système digestif. Ce manque de motilité gastro-intestinale pourrait être le signe d'une maladie telle que la maladie inflammatoire chronique de l'intestin. [2][7]

Quelle est la fréquence normale des boules de poils ?

Bien que les boules de boules de poils soient un problème commun, il n’y a pas d’études sur la fréquence des boules de poils chez le chat, il est donc difficile de déterminer ce qu’est la fréquence normale des boules de poils. La plupart des données existantes viennent d'expérience personnelle de vétérinaires en cliniques, et la norme semblerait être entre quelques boules de poils par an à une ou deux boules de poils par mois. Dans une étude sur les chats âgés,  77% des propriétaires de chats rapportaient voir des boules de poils dans les vomis de leurs chats, et 24% des chats vomissaient au moins une fois par mois. [16]
Plusieurs études ont noté que dans les cas de maladie gastro-intestinale chronique tels que les intolérance alimentaire ou la maladie inflammatoire chronique de l'intestin, les boules de poils étaient un symptôme commun. Néanmoins, d'autres professionnels vétérinaires considèrent que cela pourrait être un processus physiologique normal.
Plutôt que de se concentrer sur la fréquence des boules de poils, un meilleur indicateur serait de surveiller les changements dans ce qui est « normal » pour vos propres chats, ainsi que la présence d'autres symptômes tels que la perte de poids ou le manque d'appétit. [12][18]


Le dilemme de l'œuf ou de la poule

Selon les connaissances actuelles sur la relation entre les boules de poils et les maladies gastro-intestinales, il semble que la présence de boules de poils puisse causer des problèmes gastro-intestinaux, mais il est également possible que les maladies gastro-intestinales entraînent des boules de poils. Par conséquent, dans les cas individuels, c'est souvent un dilemme de l'œuf ou de la poule, où il n'est pas clair quel problème est apparu en premier. [12][18]

Les remèdes contre les boules de poils

Si les boules de poils sont liées à une maladie gastro-intestinale sous-jacente, la priorité est la gestion de la maladie, ce qui devrait réduire l'occurrence des boules de poils. Dans ce cas, je vous recommande d’explorer les options thérapeutiques avec votre vétérinaire.


Réduire la quantité de poils ingérés

Vous pouvez réduire la quantité de poils ingérés en brossant votre chat quotidiennement pour aider à retirer les poils morts. Dans les cas les plus extrêmes et en particulier pour les chats à poils longs, une possibilité est de raser les poils du chat en une coupe lion ou sur le ventre. [2][6]
Pour prévenir une infestation de puces, assurez-vous d'être à jour dans la prévention des puces.

Approche diététique

Les fibres

Une alimentation riche en fibre est souvent utilisée pour réduire l'occurrence des boules de poils, néanmoins les études sur l’efficacité des aliments riches en fibres sont relativement inconsistantes. Aucune des études examinaient la quantité de boules de poils vomit. La plupart se basent sur les symptômes associés aux boules de poils rapportés par les propriétaires, comme les vomissements ou la toux, tandis que d’autres études se basent sur la quantité de poils excrétée dans les selles.
La pulpe de betterave, un type de fibre soluble, n’a pas montré d’efficacité ni l’herbe de miscanthus un type de fibre insoluble.
Les fibres de cannes à sucre et la cellulose ont toutes les deux été efficaces dans une étude, mais inefficaces dans une étude ultérieure.
Le psyllium, associé avec de la poudre d’écorce d’orme rouge ou de la cellulose, pourrait être efficace.
L'hypothèse pour expliquer comment les fibres pourraient réduire la fréquence des boules de poils est que les fibres augmentent la motilité gastrique, ce qui aide à expulser les poils de l'estomac avant la formation des boules de poils.
Bien que de nombreux aliments industriels soient commercialisés comme réduisant l'incidence des boules de poils, il n'existe aucune étude publiée sur ces aliments. Certaines marques, comme Royal Canin ou Purina, mentionnent avoir mené des études internes, mais aucune des ces études n'est publiée ou disponible publiquement.
Donc, si votre chat est prédisposé aux boules de poils, vous pouvez essayer une alimentation élevée en fibres ou ajouter des fibres à son alimentation, néanmoins ce n’est pas une solution garantie. [6][8][9][10][13][14]


Les enzymes

Une récente solution qui a été exploré dans une étude est de donner des enzymes protéases qui dégradent les poils, et donc qui préviendrait la formation des boules de poils. Cela pourrait être efficace en combinaison avec une alimentation élevée en fibre. [11]


La lécithine de jaune d’oeuf

Le jaune d'œuf contient de la lécithine, qui est une source de choline. La choline est une vitamine nécessaire à la synthèse de l'acétylcholine, un composé important pour les contractions musculaires gastro-intestinales. Comme nous l'avons vu, l'une des hypothèses de la cause des boules de poils est un manque de motilité gastro-intestinale, ce qui rend la supplémentation en choline une option intéressante. [19]
Une autre façon dont la lécithine pourrait aider est qu'elle agit comme un émulsifiant, liant les graisses et l'eau ensemble. En se liant aux graisses dans les boules de poils, elle pourrait aider à les décomposer.
Étant l'une des sources les plus riches en choline, donner régulièrement du jaune d'œuf de poulet ou de caille à votre chat pourrait aider à lutter contre les boules de poils. Cependant, pour un chat sujet aux boules de poils, donner directement de la lécithine de jaune d'œuf pourrait être plus efficace. Il n'existe aucune étude sur l'efficacité de la lécithine de jaune d'œuf, mais cela vaut la peine d'essayer si d'autres solutions n’ont pas fonctionné pour votre chat.
Je recommanderais de commencer avec moins d'une capsule et d'augmenter progressivement à une ou deux capsules par jour.
Mon expérience avec la lécithine de jaune d'œuf a été plutôt positive. Après plusieurs mois de tests avec l'une de mes chattes Norvégiennes sujettes aux boules de poils régulières, la fréquence de ses boules de poils est passée d’une fois par semaine à environ une fois par mois. J'ai trouvé qu'une capsule par jour était un dosage qui fonctionnait bien pour elle, cette option s'est révélée être la plus adaptée, contrairement aux fibres qui n’ont pas aidé.


Les lubrifiants

Occasionnellement, lorsque votre chat est gêné par une boule de poil, l'utilisation de lubrifiants sous forme d'huile minérale, telle que de la vaseline aromatisée, peut aider une boule de poils existante à passer dans le système digestif. Cependant, cette approche ne prévient pas les boules de poils mais aide seulement lorsqu'elles sont déjà formées. [2]


Pour conclure

Il est difficile de dire avec certitude si des boules de poils régulières sont un phénomène normal ou préoccupant. Cependant, il semblerait que des boules de poils très fréquentes, surtout lorsqu'elles sont associées à d'autres symptômes tels que le manque d'appétit, pourraient être un signe de maladie gastro-intestinale.
Concernant la prévention contre les boules de poils, certaines options existent, mais gardez à l'esprit qu’il y a peu d’études à ce sujet, donc prenez-les avec un grain de sel. N'hésitez pas à expérimenter pour trouver ce qui fonctionne le mieux pour vos chats.


Sources

[1] Kim, H. S. et al. (2019) “Effects of coat length and faecal hair removal on measured nutrient digestibility in cats.”, Journal of feline medicine and surgery, 21(4), pp. 379–386.

[2] Cannon M. (2013) “Hair balls in cats: a normal nuisance or a sign that something is wrong?”, Journal of feline medicine and surgery, 15(1), pp. 21–29.

[3] Beynen, A. C., Middelkoop, J. & Saris, D. H. (2011) “Clinical Signs of Hairballs in Cats Fed a Diet Enriched with Cellulose.”, American Journal of Animal and Veterinary Sciences, 6(2), pp. 69-72.

[4] Haynes, K. J., Anderson, S. E., & Laszlo, M. P. (2010) “Nasopharyngeal trichobezoar foreign body in a cat.”, Journal of feline medicine and surgery, 12(11), pp. 878–881.

[5] Kottwitz, J., & Munsterman, A. S. (2013) “Pyloric trichobezoar in a Canadian lynx (Lynx canadensis).”, Journal of zoo and wildlife medicine : official publication of the American Association of Zoo Veterinarians, 44(4), pp. 1111–1114.

[6] Weber, Mickaël et al. (2015) “Influence of the dietary fibre levels on faecal hair excretion after 14 days in short and long-haired domestic cats.”, Veterinary medicine and science, 1(1), pp. 30–37. 

[7] Norsworthy, Gary D et al. (2013) “Diagnosis of chronic small bowel disease in cats: 100 cases (2008-2012).”, Journal of the American Veterinary Medical Association, 243(10), pp. 1455–1461.

[8] Dann, J. R., Adler, M. A., Duffy, K. L., & Giffard, C. J. (2004) “A potential nutritional prophylactic for the reduction of feline hairball symptoms.”, The Journal of nutrition, 134(8 Suppl), pp. 2124S–2125S. 

[9] Loureiro, B. A. et al. (2014) “Sugarcane fibre may prevents hairball formation in cats.”, Journal of nutritional science, 3, e20. 

[10] Donadelli, R. A., & Aldrich, C. G. (2020) “The effects of diets varying in fibre sources on nutrient utilization, stool quality and hairball management in cats.”, Journal of animal physiology and animal nutrition, 104(2), pp. 715–724. 

[11] Miltenburg, T. Z. et al. (2021) “Effects of combined use of keratinolytic enzymes and sugarcane fibre on the hairball excretion in cats.”, Journal of animal physiology and animal nutrition, 105 Suppl 2, pp. 129–137.

[12] German, A. J., & German, A. C. (2013). Bad hair day. Journal of feline medicine and surgery, 15(1), 6–7.

[13] Loureiro, B. A., Monti, M., Pedreira, R. S., Vitta, A., Pacheco, P. D. G., Putarov, T. C., & Carciofi, A. C. (2017). Beet pulp intake and hairball faecal excretion in mixed-breed shorthaired cats. Journal of animal physiology and animal nutrition, 101 Suppl 1, 31–36.

[14] Antunes Donadelli, Renan & Aldrich, Greg. (2017). 236 Effect of grass as a dietary method to aid hairball control in cats.. Journal of Animal Science. 95. 116. 10.2527/asasann.2017.236. 

[15] Woerde, D. J., Hoffmann, K. L., Kicinski, A., & Brown, N. L. (2019). Oesophageal obstruction due to trichobezoars in two cats. JFMS open reports, 5(1), 2055116918823581.

[16] Dowgray, N., Pinchbeck, G., Eyre, K., Biourge, V., Comerford, E., & German, A. J. (2022). Aging in Cats: Owner Observations and Clinical Finding in 206 Mature Cats at Enrolment to the Cat Prospective Aging and Welfare Study. Frontiers in veterinary science, 9, 859041.

[17] Wilson, S., Dobbins, D., Kawalilak, L., & Parambeth, J. C. (2023). Endoscopic administration of Coca-Cola for medical management of a wedged intestinal trichobezoar in a cat. The Canadian veterinary journal = La revue veterinaire canadienne, 64(8), 747–752.

[18] Pawenski, M., Smola, C. C., Dionne, T., & Larson, M. (2023). Histopathologic diagnosis and patient characteristics in cats with small intestinal obstructions secondary to trichobezoars. Journal of feline medicine and surgery, 25(9), 1098612X231196231.

[19] Zhao, F., Li, R., Liu, Y., & Chen, H. (2023). Perspectives on lecithin from egg yolk: Extraction, physicochemical properties, modification, and applications. Frontiers in nutrition, 9, 1082671.

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