Munchkin : ont-ils des problèmes de santé ?

Après avoir écrit sur les problèmes de santé des chats brachycéphales, comme les Persans et les Scottish Folds, nous allons aborder aujourd’hui une autre race controversée : le Munchkin. Les chats Munchkins, parfois appelés “chat nains", ont une mutation génétique qui implique que ces chats ont des pattes courtes. Dans cet article, nous allons discuter de ce que l’on sait sur leur mutation génétique, leur santé et si cette race peut être considérée comme éthique.




L’histoire de cette race

Dès l’année 1944, des chats avec des pattes courtes avaient déjà été signalés. Néanmoins, l’histoire de la race Munchkin est plus récente. En 1983, Sandra Hockenedel trouva en Louisiane une femelle errante et gestante avec des pattes courtes : Blackberry. La moitié de ses chatons avaient aussi les pattes courtes, la race du Munchkin fut créée à partir de cette femelle et un de ses chatons mâles en les croisant avec des chats de gouttière.
La race a ensuite été reconnue en 1994 par The International Cat Association (TICA). Les chats Munchkin ont donc une mutation qui est apparue spontanément parmi des chats de gouttière. Cette mutation est aussi apparue à d’autres époques et dans d’autres lieux comme cela a été rapporté par Messy Beast.
Actuellement, les Munchkins ont été croisés avec d’autres races de chat pour créer de nouvelles races de chats nains. Des exemples de ces races sont le Minuet ou Napoléon (un croisement Persan/Munchkin), le Bambino (un croisement Sphynx/Munchkin), le Scottish Kilt (un croisement Scottish Fold/Munchkin), le Dwelf (un croisement Bambino/American Curl)...
Parce que la race du Munchkin et toutes les races qui en dérivent sont caractérisées par une déformation du corps, de nombreuses associations félines comme la Fédération internationale féline (Fifé), le Governing Council of the Cat Fancy (GCCF) au Royaume-Uni ou encore le Cat Fancier Association (CFA) ne les reconnaissent pas. Les informations sur la mutation génétique et les problèmes de santé que j’aborde dans le reste de l’article concernent aussi les races dérivatives.
Selon les éleveurs, les chats Munchkin courent et se comportent normalement si ce n’est qu'ils ne peuvent pas sauter aussi haut qu’un chat ayant des pattes normales.

Un chat Scottish Kilt

La génétique

Les chats Munchkins ont une forme de nanisme disproportionné, puisque leurs pattes sont courtes mais le reste de leur corps et leur tête sont de taille normale. Cette mutation prévient la croissance des os de leurs pattes ce qui explique leur taille réduite.
Le gène de cette mutation a été récemment identifié en 2020 et cela a confirmé que le gène est dominant. De plus, le croisement entre deux chats Munchkin donne des portées de taille anormalement petites, et aucun chat n’a jamais été testé comme homozygote, il en a donc été déduit que la version homozygote du gène est létale à un stade embryonnaire précoce.
L’allèle dominant est noté Mk pour Munchkin et l’allèle récessif est mk pour les chats avec des pattes normales. Cela signifie que si un chat est Mk/mk (hétérozygote), il aura des pattes courtes, tandis que s'il est mk/mk il aura des pattes normales. Les embryons Mk/Mk (homozygote) meurent in utero.

Voici quelques tables de croisement pour mieux comprendre les différents croisements possibles.

Donc, des chatons peuvent naître avec des pattes normales même si leurs deux parents sont des Munchkins. Dans ce cas, ils sont généralement appelés des Munchkins “non-standard”, tandis que ceux avec des pattes courtes sont des Munchkins “standard”.

Bien que l’apparence des Munchkins soit similaire à celle des races de chien naines comme les Teckels et les Corgis, ils ont des mutations génétiques différentes. Ces chiens ont une mutation du facteur de croissance des fibroblastes 4 (FGF4) tandis que les chats Munchkins ont une mutation liée au gène de l'UDP-glucose 6-déshydrogénase (UGDH). Cela signifie que les problèmes de santé présents dans ces races de chien, tels que la dégénération et la calcification des disques intervertébraux ne peuvent pas être automatiquement extrapolées aux chats.

Les problèmes de santé

Contrairement à d’autres mutations physiques comme les oreilles repliées, les effets de cette mutation sur la santé n’ont pas été étudiés de façon extensive. Jusqu’à maintenant les études sur le Munchkin se concentraient principalement sur l’identification du gène car ces études pouvaient permettre de mieux comprendre certaines formes de nanisme non identifiées chez l’humain.
Il y a actuellement une seule étude qui analyse les répercussions sur le squelette de cette mutation. [1] Les radiographies et les imageries par résonance magnétique ont révélé que tous les membres des Munchkins ont des difformités, en plus d’êtres plus courts, comparés aux membres de chats normaux. En particulier, il a été observé qu'il y avait des torsions sur les pattes avant des chats.
Bien que certaines des déformations pourraient ne pas affecter les chats cliniquement, en effet, comme ceux-ci sont des quadrupèdes, ils peuvent compenser certains défauts d’alignement, en revanche d’autres déformations pourraient les prédisposer à des maladies articulaires. En particulier, des déformations similaires chez le chien ont été associées à de l'ostéoarthrite et des luxations chez les chiens.
Néanmoins, chez le chat, il n’a pas de signe de dégénération prématurée des disques intervertébraux, comme c’est le cas chez les races naines de chiens.

Comparaison entre un Munchkin sur la gauche et un chat domestique avec des pattes normales sur la droite [2]

Cette étude a des limitations, en particulier la taille de l’échantillon était seulement de 6 chats. Cela souligne que des recherches supplémentaires sont nécessaires en particulier pour comprendre les effets sur les articulations, des déformations des membres durant la durée de vie du chat. Cette étude a été faite sur des Munchkins avec différentes longueurs de pattes : les Munchkins élevés pour avoir des pattes les plus courtes possibles pourraient avoir plus de problèmes que les Munchkins avec des pattes plus longues.

D’autres pathologies ont été rapportées de façon anecdotique pour cette race tel qu’une lordose, une déformation de la colonne vertébrale, ou un pectus excavatum, une déformation du thorax. Mais, il n’y a pas d’études sur ces pathologies.


Pour conclure, il y a des preuves qui montrent que les chats Munchkins n’ont pas seulement des pattes courtes mais qu’ils présentent aussi des déformations et des défauts d’alignements des membres. Bien que l’impact de ces déformations sur la santé à long terme de ces chats ne soit pas clair, elles pourraient les prédisposer à de l’arthrose. Les tendances actuelles comme l’élevage de Munchkins avec des pattes de plus en plus courtes, comme les chats “rug hugger” devraient être surveillées.
Tant qu’une étude ne démontrera pas clairement que cette mutation n’impacte pas la santé des Munchkins, l’élevage de cette race ne peut pas être considéré comme éthique ou responsable.



Sources

[1] Anderson LM, Fox DB, Chesney KL, Coates JR, Torres BT, Lyons LA. Skeletal Manifestations of Heritable Disproportionate Dwarfism in Cats as Determined by Radiography and Magnetic Resonance Imaging. Vet Comp Orthop Traumatol. 2021 Sep;34(5):327-337. doi: 10.1055/s-0041-1730355. Epub 2021 Jun 3. PMID: 34082456.
[2] Struck, AK., Braun, M., Detering, K.A. et al. A structural UGDH variant associated with standard Munchkin cats. BMC Genet 21, 67 (2020).
[3] Buckley RM, Davis BW, Brashear WA, Farias FHG, Kuroki K, Graves T, Hillier LW, Kremitzki M, Li G, Middleton RP, Minx P, Tomlinson C, Lyons LA, Murphy WJ, Warren WC. A new domestic cat genome assembly based on long sequence reads empowers feline genomic medicine and identifies a novel gene for dwarfism. PLoS Genet. 2020 Oct 22;16(10):e1008926.
[4] Lyons, Leslie & Fox, Derek & Chesney, Kari & Buckley, Reuben & Coates, Joan & Gandolfi, Barbara & Grahn, Robert & Hamilton, Michael & Middleton, John & Sellers, Samantha & Villani, Natalie. (2019). Localization of a feline autosomal dominant dwarfism locus: a novel model of chondrodysplasia.
[5] William-Jones H. Arrested development of the long bones of the fore-limbs in a female cat. Vet Rec. 1944;56(449):131–2.

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